Améliorer votre sourcing RH : les meilleures techniques pour aborder un candidat passif

12 novembre 2020 Approche directe, Expérience candidat, Sourcing 0 Comments Marie MEHAULT
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Le candidat passif, c’est ce salarié qui correspond parfaitement au profil que vous recherchez pour pourvoir un poste, mais qui n’est malheureusement pour vous pas en recherche d’emploi active, et le plus souvent même, déjà employé par la concurrence. En tout cas, il n’est pas dans la démarche de rechercher à un travail ou de répondre à des offres d’emploi, et c’est à vous d’aller le chercher, le séduire et le débaucher. Voici donc quelques conseils d’experts pour vous y prendre de la façon la plus efficace et la plus convaincante possible.

Identifier votre candidat passif et définissez son profil

« La première chose à faire pour attirer un candidat passif, c’est d’abord de l’identifier, de le débusquer, et de définir son profil et la meilleure façon de le séduire. C’est typiquement le rôle des chasseurs de tête, mais c’est aussi votre rôle en tant que RH si vous souhaitez éviter de déléguer cette mission à un cabinet extérieur », explique la patronne d’une grande agence d’intérim française.

« Contrairement au candidat actif, qui, comme ce qualificatif le désigne, est actif sur les réseaux sociaux, sur internet, a une démarche d’envoi de candidatures, de CV, de recherche d’opportunités, le candidat passif est à l’inverse silencieux sur la toile, ou sur les espaces recruteurs. C’est la première différence, et elle est importante pour savoir quoi faire face à ce candidat passif. D’autant qu’il est assez difficile de distinguer un candidat passif, mais en veille d’opportunités, d’un candidat qui n’a aucune intention de bouger parce qu’il est parfaitement bien là où il est. Il faut donc savoir chercher et surtout, savoir décrypter les signes et lire les indices laissés par votre cible ! ».

Néanmoins, la conjoncture actuelle joue en votre faveur : il y a de moins en moins de candidats, dans les actuelles générations, enclins à rester toute leur vie dans la même entreprise, même s’ils y évoluent en termes de carrière. La crise sanitaire et économique a réveillé le stress de chacun de voir sa situation professionnelle se dégrader, et de plus en plus de candidats passifs sont à l’écoute, désormais, de nouvelles opportunités, même s’ils ne sont pas encore passés au stade de la recherche active. A vous, donc, de savoir les reconnaître et de leur faire une proposition adaptée.

« La deuxième différence entre un candidat actif et un candidat passif, c’est le niveau d’exigence », reprend notre experte en intérim. « Même si, avec la crise, les candidats passifs aussi revoient à la baisse leur niveau d’attente quant à un nouveau poste, il n’en demeure pas moins qu’ils sont a priori bien dans leur poste actuel, et que pour les en faire bouger, il faut forcément une carotte de bonne taille ! Salaire, flexibilité, congés, avantages en nature, primes, titre, etc…. rien n’est à négliger pour séduire un candidat passif. Le candidat actif a évidemment ses exigences lui aussi, mais il est plus pressé, il est prêt à davantage de concessions que le candidat passif ».

Vous n’êtes pas obligé de toujours chercher votre candidat passif au dernier moment : n’hésitez pas à vous constituer une banque de données (vivier) de candidatures intéressantes pour votre entreprise :

« soit en compilant celles que vous avez refusées pour un certain poste mais que vous trouviez intéressantes et adaptées à un autre poste – alors déjà occupé dans votre entreprise, mais qui potentiellement peut se libérer n’importe quand – , soit en missionnant certains membres de votre équipe à cette prospection de façon permanente, de façon à vous assurer que vous avez toujours un œil ouvert sur les talents du marché du travail dans votre secteur. C’est évidemment particulièrement intéressant pour les postes stratégiques, qui ont besoin d’être pourvus très rapidement en cas de vacance, et par des profils ultra qualitatifs. Aujourd’hui, tous les recruteurs le savent : la concurrence est telle, et la tension sur certains métiers si importante, qu’on ne se fait plus de cadeaux, on cherche à recruter les meilleurs, point final, et pas seulement les personnes disponibles. C’est même aujourd’hui quasiment le contraire : moins une personne est disponible dans sa vie active, moins elle a de trous dans son CV, plus on va considérer qu’elle est précieuse et qu’il nous la faut », explique l’Observatoire du Recrutement.

Sillonner les CVthèques et faire jouer les réseaux

« Le réseau, c’est la clé de tout, en matière de recrutement, et c’est encore plus vrai quand on parle de candidats passifs », explique un spécialiste de l’économie comportementale du marché du travail au Centre d’Economie de la Sorbonne. « Le recruteur doit, aujourd’hui, recourir massivement au réseau. On parle ici à la fois du réseau physique, social, des personnes rencontrées à un forum, un salon, dans une soirée, un séminaire, et même parfois par hasard au cours de la vie privée, et du réseau virtuel : tous les réseaux sociaux doivent être explorés, scrutés, analysés, vous devez en devenir un spécialiste, y compris pour les applications que vous n’utilisez pas vous-même en temps normal, ou alors recruter un spécialiste RH de ces questions numériques, qui saura dresser le profil d’un candidat passif de manière précise à partir des indices laissés sur les fils de discussions, des posts, des commentaires, des photos diffusées, etc…. cela ne s’improvise pas, mais c’est devenu crucial, c’est donc un enjeu immense pour les recruteurs aujourd’hui que de peaufiner leur stratégie sur ce sujet. Parfois, pour bien recruter sur la durée, il faut commencer par recruter des spécialistes…. Du recrutement ! Les chasseurs de tête spécialisés dans le digital sont extrêmement précieux de nos jours dans un service RH, et il ne faut pas hésiter à y mettre le prix, l’investissement sera rentabilisé au centuple… ».

Les candidats passifs sont souvent recherchés par les recruteurs en quête de compétences particulières et qui veulent recruter pour des emplois à haut degré de qualification ou nécessitant un savoir faire pointu. Selon un chercheur canadien qui s’est penché sur la situation des candidats passifs en France, ils correspondent à 95% soit à des managers / cadres supérieurs (directeurs, administratif, RH, comptabilité, finances…), soit des salariés aux compétences particulièrement recherchées, dans les secteurs en très forte tension et qui souffrent de pénurie de main d’œuvre (transport, logistique, métiers de la mer, santé), soit encore à des salariés aux compétences rares, car nouvelles ou excessivement techniques (informatique, développement durable et nouvelles énergies, par exemple). Pour mettre le maximum de chances de leur côté de séduire ces profils qu’ils veulent recruter mais qui ne sont pas pro actifs, les recruteurs ont compris qu’ils devaient désormais non seulement savoir repérer ces talents passifs, mais aussi s’adresser à eux de manière personnalisée et différente de la façon dont ils s’adressent à des candidats actifs.

Bien personnaliser le message pour chaque candidat

Proposer à chaque candidat passif un propos et une stratégie d’approche différents, adaptés à qui il est, ce qu’il fait, son profil, ses compétences, c’est un jeu difficile mais qui peut s’avérer extrêmement payant sur l’échiquier du marché du travail et des talents rares.

« C’est un recrutement d’un autre niveau que celui qui se consacre aux candidats actifs », explique une chasseuse de tête parisienne, qui apporte régulièrement son concours aux RH des grandes entreprises françaises. « A ce stade, vous ne devez pas lésiner sur la personnalisation des messages envoyés aux candidats que vous voulez séduire, il faut leur offrir un nouveau champ de vision, de nouvelles perspectives, donc une expérience candidat à laquelle ils ne s’attendaient pas, extrêmement attractive et qui intervient comme une belle surprise tombée du ciel ! ».

On appelle cela « convertir » un candidat : de passif à actif, en le rendant réceptif.

« Un candidat passif est inattentif, par définition, à ce qui se passe autour de lui, car il a un emploi, il est bien où il est, il ne cherche pas à changer. Mais quelqu’un qui n’écoute pas les bruits ambiants n’est pas quelqu’un qui n’entend pas. Il y a une différence entre être sourd et ne pas prêter attention ! », analyse un spécialiste de l’expérience candidat, organisateur chaque année des Candidate Expérience Awards à la mi-novembre. « Il est donc nécessaire, quand on veut recruter un candidat passif, d’adapter sa stratégie de recrutement : non seulement le discours, mais aussi la posture, et les outils. C’est ce qu’on désigne désormais comme le recrutement inbound, ce qui signifie littéralement le recrutement entrant. En clair, on investit non plus dans un message global à destination de tous les candidats potentiels, quels qu’ils soient, en arrosant large mais sans ciblage ; au contraire, on investit dans un message ultra ciblé à destination de personnes très précises repérées au préalable, et auxquelles on s’adresse à elle de façon à l’intéresser à nous, avec une méthode la plus interactive et personnalisée possible, avec tous les outils que sont les réseaux sociaux, les moteurs de recherche, les médias sociaux, les blogs, les banques de méta données etc…. C’est le candidat qui doit avoir le sentiment que la décision lui revient au final, et non le recruteur….. mais c’est au recruteur de savoir attirer et séduire adroitement le candidat qu’il désire, jusqu’à ce que celui-ci fasse la démarche d’accepter le recrutement ».

Mettre en avant votre marque employeur

Cela étant posé, l’outil primordial de ce recrutement inbound, c’est votre marque employeur. Il a été démontré, ces dernières années, que le recrutement dit « transactionnel » intéresse désormais beaucoup moins les candidats, a fortiori les candidats passifs, que la culture de l’entreprise pour laquelle ils veulent travailler.

« Cela veut dire que c’est moins le descriptif de poste, le salaire ou les avantages proposés dans le contrat qui vont l’emporter dans la décision du candidat, que vos valeurs et le sentiment qu’il aura de venir travailler pour une entreprise qui jouit d’une bonne réputation, donc d’une marque employeur forte », explique un chercheur de l’IFOP, l’Institut d’Etudes Opinions et Marketing en France, qui a mené une enquête sur la relation entre réputation employeur et décision de candidater aux offres d’emplois. « Vous devez désormais partir du principe que votre marque employeur est votre meilleur atout, et la mettre en valeur le mieux possible, toujours chercher à la renforcer, à l’améliorer, et le faire savoir. Car c’est cela qui fera que les candidats passifs que vous essaierez de débaucher finiront par accepter votre offre ».

« 4 candidats sur 10 se renseignent sur la culture d’une entreprise et sur la marque employeur du recruteur avant de prendre la décision définitive de répondre à une offre d’emploi. Et un candidat sur deux affirme même que c’est le critère qui l’emporte sur tous les autres. Donc faites en sorte d’avoir une marque employeur forte, et montrez-le, dites-le, exposez-la, faites circuler l’information, sur les réseaux sociaux, par le biais de vos salariés, communiquez sur vos activités, vos valeurs, vos engagements, vos prises de responsabilités, votre détermination à avoir des valeurs puissantes et à les assumer, à investir dessus. Organisez des « Candidate Journey », des journées portes ouvertes durant lesquelles les candidats actifs comme passifs pourront venir tester sur place et toucher du doigt très concrètement ces valeurs, mesurer l’ampleur de ce que vous leur proposez en termes de culture d’entreprise, de carrière, d’évolution, de projet de vie ».

Marie MEHAULT